François Anto EST Né LE 3 AOÛT
Je suis né le 3 août. A presque quarante ans.
Et puis je me suis mis à chanter. A écrire. Des bouts de mois. Des bouts de moi. Au fil de moi. Au fil des mois. De ce qui s'était passé. De ceux qui étaient passés.
Je me suis souvenu des libellules de mon enfance. Celles qui défiaient les vents contraires. Avec leurs grands ailes en cadence, leur chant réchauffait mes hivers.
Je me souviens du moment où j'ai écouté pour la première fois l'arrangement d'Eric Miller. Ses sons sur mes mots. Une émotion. Une sensation étrange de paternité.
Le chant des libellules
François Anto, Eric Miller
Un champ, l'été, près du ruisseau
Les amies d'l'enfant que j'étais
Affairé d'sa pelle et d'son seau
Regardaient les grands se noyer
Une est devenue ma fidèle
Elle se prit dans mes filets
Sitôt cessa d'battre des ailes
Fit la morte pour m'échapper
Les libellules de mon enfance
Cell'qui défiaient les vents contraires
Avec leur grands ailes en cadence
Leur chant réchauffait mes hivers
Un soir d'cafard, sans crier gare
Elles s'envolèrent de mon enfance
Mais avant qu'il ne soit trop tard
J'voulais hurler d'tout mon silence
J'n’ai pas franchi la barre du son
Bourré de cahiers d'coloriages
Mon cartable fut ma prison
Ma croix de guerre, mon héritage
Les libellules de mon enfance
Comme elles, je voulais changer d'ère
Pour aller sans retour vers ma chance
Une fusée pour la stratosphère
Le jour qu't'as filé à la douce
Tu ne pouvais plus dire un mot
T'as fait l'mort, tu m'filas la frousse
Elles avaient gagné ton cerveau
Les libellules de tes souffrances, papa
Je vous ai tant détestées
Arrachées les ailes... Silence
Pendant que mon âme se noyait
Les libellules de ton enfance
Tu agonisais de leur secret
Les libellules ont en partance
Refermé tes yeux révulsés
Je n'souffre plus comm' je souffrai
Malgré mon souffle déjà court
Puisqu'en suivant ce sentier
J'ai enfin compris à mon tour
Il était-là ton lourd secret
C'est qu'un jour tu allais m'quitter
Pour me permettre de devenir
A mon tour, un père tant aimé.
Les libellules de mon enfance
Volèrent si longtemps et loin
Quittant l'onde et l'indifférence
Pour le dernier champ, l'ultime coin
Pour le dernier champ, l'ultime coin
Droits réservés Sacem
Un matin. Une mélodie au piano. Je l'adresse à Eric Miller. Avec un texte et un fichier son de la ligne de chant. Juste quelques notes. Un peu de ma voix. Un petit bruit familier. Tes pas dans l'escalier. Tu défais tes paquets. Viens plus vite m'embrasser.
Je ne sais pas pourquoi j'ai écrit cette chanson. Au départ, je voulais une structure inspirée de la chanson de Franck Sinatra "It was a very good year". Des ponts entre les époques décrites par les couplets. Le résultat est très différent. Une chanson ne nous appartient pas vraiment. J'ai écrit couplets intermédiaires sur les ponts qui n'en sont finalement plus. Recouverts de mots.
René Char avait raison “Les mots qui vont surgir savent de nous des choses que nous ignorons d’eux.”
Un petit bruit familier
François Anto, Eric Miller
Un p'tit bruit familier
Tes pas dans l'escalier
Tu défais tes paquets
Viens plus vit'm'embrasser
Un p'tit bruit familier
Ta joie dans l'escalier
Toi et moi : un enfant ! Viens !
Tes seins le feront grand
Un p'tit bruit familier
Tu pleures dans l'escalier
Les clichés dans mes mains
Cette ombre dans ton sein
Combien de temps ? Combien de vies ?
Faites un miracle docteur je vous en prie
Et vous les saints de mon enfance
Délivrez-là de ce mal, sauvez ma Clémence
Un p'tit bruit familier
Tu peines dans l'escalier
Les rayons artificiels
Voilent mon petit soleil
Combien de nous ? Combien de toi ? Combien de mois ? Combien de jours ?
Des jumeaux, c'est le compte à rebours
Non ne dis pas cela : il y a de la place pour toi
C'est toi et moi dans ce monde-là
Un p'tit bruit familier
Mes pas sur le gravier
Mènent à l'allée des marbres
Le soleil a fait pousser trois arbres
Combien d'années et de cauchemar ?
La nausée ne cesse plus depuis ton grand départ
Le souvenir de tes pas résonne dans l'escalier
Tu défais tes paquets... Viens plus vite m'embrasser
Un p'tit bruit familier
Des rires dans l'escalier
Nos enfants courent vers moi
La promesse de tes bras
Clément et Nicolas
A suivre...
François Anto